Les montagnes russes. Après le lancement de son réseau principal lundi, le projet Aptos et son jeton APT ont fait leur entrée sur FTX et sur Binance. Sur Binance, le trading a été ouvert vers 3h du matin (heure de Paris), et a vu le jeton APT bondir à plus de 50 $, avant de retomber lourdement sous les 8 $.
Après avoir atteint 100 dollars, le cours de l’APT retombe lourdement sous les 8 dollars
Nous en parlions hier dans notre trio de nouvelles cryptos à acheter absolument. Comme prévu, les cours du jeton $APT sur Binance et FTX ont donc bondi aussitôt le trading ouvert au public, vers 3h du matin. L’effet Binance n’a pas manqué : une bougie verte montant de 1 $ à 60 $ … puis retombant à 12 $ en quelques secondes :
A l’heure où nous écrivons ces lignes, l’APT se négocie à moins de 8,50 $, avec un volume d’échanges dépassant le milliard si l’on en croit les données de CoinMarketCap. Notez qu’au moins 50% des volumes sont concentrés sur Binance. Du jamais-vu pour un nouveau projet.
Il faut dire qu’Aptos était extrêmement attendu, après quatre années de développement. Les créateurs d’Aptos sont des transfuges du défunt projet Libra-Diem, qui devait servir de stablecoin à l’écosystème Facebook-Meta. Un projet caduc, dont beaucoup d’éléments ont été repris.
Le plus important d’entre ceux-ci est le langage Move, un langage de programmation développé spécifiquement par Meta, et qui a servi aux créateurs de Polkadot (DOT), Solana (SOL) et Cosmos (ATOM) notamment.
Un airdrop de 150 à 300 $APT pour les contributeurs du testnet
La chute des cours semble liée à l’airdrop très attendu, notamment par ceux qui ont contribué au développement du projet, en opérant par exemple un des 20 000 nœuds recensés sur les différents testnets du projet.
Les contributeurs éligibles ont donc reçu, au bout de la nuit, entre 150 et 300 $APT selon différents critères liés à leur implication. En tout, 20 076 150 APT ont été distribués à 110 235 participants.
Premier accroc pour les bénéficiaires de l’airdrop : pour retirer les APT, il a fallu payer les frais de gaz en … APT 🤔. Un nœud gordien, que les plus malins ont pu trancher rapidement au moyen de l’entraide : emprunter des jetons à d’autres bénéficiaires, à charge de rembourser aussitôt les jetons APT déverrouillés.
Les plus rapides ont par conséquent été en mesure de convertir leur airdop Aptos en BUSD ou en USDT sur Binance. En supposant un cours de 50 $, la distribution pourrait avoir rapporté à chacun entre 7 500 et 15 000 $.
Sur ce graphique de 15mn, on peut constater l’importance des volumes vendeurs (en rouge) dans les minutes qui ont suivi le lancement, indiquant une conversion massive des jetons $APT en BUSD :
Aptos : une layer 1 valorisée à 2 milliards avant son lancement
Si le lancement d’Aptos a trouvé un tel écho, c’est à la fois en raison de ses promesses techniques et de l’ampleur financière prise par le projet.
Côté technique, Aptos se présente comme l’avenir des blockchains de layer 1, à l’image d’Ethereum. Une blockchain programmable qui s’appuie sur des éléments du défunt mais très ambitieux projet Diem mené par Facebook-Meta, et que le groupe avait cédé à la banque Silvergate Capital en février dernier pour 182 millions $.
Grâce à ses innovations, Aptos ambitionne de construire un écosystème DeFi, NFT et GameFi aussi puissant que celui de son illustre concurrent :
Côté financier, il faut admettre qu’il y a du beau monde derrière Aptos : FTX Ventures, Binance Labs, Coinbase Ventures, PayPal, etc. Le projet a mené à bien trois levées de fonds, dont les deux dernières ont beaucoup fait parler d’elles. En effet, le dernier tour de table a été bouclé en juillet dernier pour 150 millions $, valorisant le projet à plus de 2 milliards $. Un montant inédit dans l’histoire de la blockchain, et encore plus remarquable en plein marché baissier.
Tokénomique, GAFAM, fondateur en procès, vitesse du mainnet … déjà quelques controverses autour d’Aptos
La tokénomique du jeton APT a mis du temps à être dévoilée, ce qui n’a pas manqué de susciter quelques inquiétudes. D’autant que le projet n’a pas levé ses fonds par le biais d’une ICO ou d’une IEO, qui sont la voie habituelle pour les projets blockchain. Hier, après le déploiement du mainnet, nous avons finalement pu en savoir plus sur la distribution initiale des jetons :
- Communauté : 510 millions (51,02%)
- Développeurs : 190 millions (19%)
- Aptos Foundation : 165 millions (16,5%)
- Investisseurs : 134 millions (13,48%)
La communauté s’est inquiétée de constater que sur les jetons destinés à la « communauté » (510 millions), 410 millions sont encore aux mains de l’Aptos Foundation et 100 millions aux mains d’Aptos Labs … En tout, ce sont donc pas moins de 80% des jetons qui sont encore détenus par l’équipe.
Autre point d’interrogation, le débit réel des transactions sur le mainnet, annoncé à près de 100 000 transactions par seconde. Un utilisateur, connu grâce à son compte Twitter Paradigm Engineer #420 semble avoir mené sa propre enquête et a très rapidement mis en doute les chiffres avancés par Aptos Labs. En réalité, le débit se trouverait plus près des … 4 transactions par seconde. Soit encore moins que Bitcoin (BTC).
Let's look at transaction speeds on Aptos.
Aptos promises 100k TPS in its finalized version. However, the current TPS is somewhere around 4 transactions per second. pic.twitter.com/joWnxAeIpZ
— Paradigm Engineer #420 (@ParadigmEng420) October 17, 2022
Dernier questionnement, cette fois concernant son fondateur Mohammad Shaikh. Celui-ci fait face à un procès, dans lequel un ex-associé lui réclame pas moins de 1 milliard de dollars. En mars dernier, Shari Glazer et sa société Swoon Capital ont déposé une plainte contre Matonee (la société-mère d’Aptos Labs), affirmant avoir été floués par Mo Shaikh dans le partenariat autour d’Aptos. Glazer demande à récupérer 50% des parts de ce dernier dans l’entreprise. Le procès doit se tenir d’ici la fin de l’année, si l’on en croit les informations de Cointelegraph.
—
Bien évidemment, tous ces questionnements et ces nuages qui pèsent sur la maison Aptos n’enlèvent rien au potentiel technique de sa blockchain. En particulier avec le langage Move, qui semble déjà faire l’unanimité dans sa capacité à résoudre bien des problèmes rencontrés avec Solidity, le langage d’Ethereum.
Partager
Romaric Saint Aubert
Crypto-journaliste
