Alors qu’un juge new-yorkais avait donné hier son feu vert, Binance.US s’apprêtait à mettre la main sur plus d’1 milliard de dollars d’actifs détenus par la plateforme en faillite Voyager. Mais nous apprenons ce matin que le Trustee Office du Ministère américain de la justice a fait appel de la décision. Changpeng Zhao et Brian Shroder pourraient abandonner un projet de rachat qui commence à coûter cher en frais d’avocats …
Après le feu vert du tribunal des faillites, le rachat de Voyager Digital par Binance.US en suspens
Le dossier Voyager Digital est le théâtre d’une âpre bataille entre les liquidateurs de la plateforme crypto en faillite et les régulateurs financiers. L’objet de la discorde ? L’offre de reprise de Binance.US. Cette offre à plus d’1 milliard, pourtant acceptée le 20 décembre dernier par les créanciers, se heurte aux réticences combinées de la Securities and Exchange Commission (SEC) et du gouvernement américain.
Les liquidateurs, représentés par le cabinet d’avocats Quinn Emanuel, souhaitent naturellement récupérer davantage que les 73% promis aux 3,5 millions de clients de la plateforme. Pour eux, l’offre de Binance.US est donc inespérée car elle permet aux clients de revoir jusqu’à 90% de leurs actifs.
Les régulateurs, menés par la SEC, souhaitent davantage de garanties sur le milliard de dollars proposé par Binance.US. Ces fonds proviennent-ils des caisses de Binance.US ou de la maison-mère Binance ? Les actifs des clients seront-ils réellement garantis ? Dans l’attente de réponses satisfaisantes, la SEC demande à suspendre toute décision dans ce dossier.
Au milieu de cette foire d’empoigne, Michael E. Wiles, juge des faillites au tribunal du District Sud de New York. Et après 8 mois d’instruction, 4 jours de procès et 20 heures d’auditions, celui-ci a décidé que les clients de la plateforme en faillite avaient trop attendu. Il a rejeté en bloc les objections de la SEC et confirmé ce 8 mars le plan de restructuration permettant à Binance.US de mettre la main sur les actifs de Voyager Digital.
Un rachat de plus en plus compromis
Mais il aura fallu à peine un jour pour que le gouvernement US revienne à la charge. Nos confrères de The Block rapportent ce matin que le bureau de l’US Trustee du ministère américain de la Justice a déposé un appel contre la décision du juge Wiles. Un recours de 135 pages qui (re)détaille les inquiétudes des régulateurs et des autorités quant à Binance.
Car il faut rappeler que malgré le chiffre de 1,02 milliard de dollars avancé dans la presse, seulement 20 millions de dollars seront réellement affectés à la liquidation. Le reste de l’offre correspond au “prix actuel du marché” pour les actifs déposés par les clients. En clair : la valeur finale de ces actifs reste encore à déterminer.
Pour mieux comprendre l’accord de rachat, il faut donc penser aux 20 millions payés par Binance.US comme à un prix d’achat pour récupérer 3,5 millions de comptes clients. Une fois l’accord acté, ces fonds seront transférés sur Binance.US et les clients obtiendront leurs identifiants et mot de passe. Ensuite, le tribunal des faillites devra autoriser le règlement des factures des liquidateurs et autres frais d’avocats.
Entre opacité et origine des fonds, les réticences des autorités américaines
Au bas mot, les clients lésés devraient par conséquent revoir sur Binance.US l’équivalent de 73% de leurs dépôts gelés depuis juin dernier. Un espoir que vient doucher le Department of Justice. En faisant appel, celui-ci reprend les préoccupations de la SEC sur la sécurité des fonds des épargnants face à l’opacité de Binance.US.
En effet, Binance.US a obtenu son agrément de plateforme d’échange aux Etats-Unis en revendiquant une indépendance totale de gestion. Or, de récentes révélations montrent comment la maison-mère aurait pris la main sur les comptes de la filiale américaine pour transférer 400 millions de dollars à une firme de trading inconnue …
L’origine des fonds pose aussi problème. Dans l’état actuel des comptes de Binance.US, celle-ci ne dispose pas d’1 milliard de trésorerie disponible. Les fonds mobilisés pour le rachat des actifs de Voyager seront donc inévitablement empruntés à Binance Global. Or, comme vous le savez, les autorités américaines ont Binance dans le viseur sur de multiples dossiers : soupçons de blanchiment d’argent, retrait de l’offre de sauvetage de FTX, mise à l’arrêt forcé du stablecoin BUSD …
Source : The Block
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