Des chercheurs de l’université de Toronto viennent de publier une étude insolite. Selon cette dernière, les détenteurs de crypto-monnaies auraient des tendances psychopathes plus développées que les autres individus.
Les détenteurs de cryptos, tous des psychopathes ? Une courte définition
Avant de plonger dans la polémique, il convient de proposer une définition de la psychopathie. Si le cinéma a permis une certaine image de cette notion, il n’en est rien. Selon le dictionnaire Larousse, voici comment est définie la psychopathie :
« État de déséquilibre psychologique caractérisé par des tendances asociales sans déficit intellectuel ni atteinte psychotique. Selon les psychanalystes, le psychopathe serait soumis à une « morale archaïque » toute-puissante, l’incitant à rechercher un milieu marginal, mais coercitif, en conflit avec l’ordre établi. La tendance actuelle est de parler de « trouble antisocial » dans le cadre des pathologies de la personnalité. »
Le dictionnaire note également des tendances à l’agressivité, un style de vie instable ou encore de la toxicomanie.
Qu’en disent les chercheurs ?
Des chercheurs de l’université de Toronto viennent de proposer une étude pour le moins surprenante. Les résultats sont inattendus :
« Les analyses ont révélé que 30% de notre échantillon possédaient une forme de crypto-monnaie et que ces individus présentaient une diversité d’allégeances et d’identités politiques. Nous avons également constaté que la propriété cryptographique était associée à la croyance dans les théories du complot, les caractéristiques de la personnalité “dark” (par exemple, le “Dark Tetrad” du narcissisme, du machiavélisme, de la psychopathie et du sadisme) et l’utilisation plus fréquente de plateformes de médias sociaux alternatives et marginales. »
Le document explique également que l’étude avait été menée sur un groupe de 2,001 personnes, adultes et de nationalité américaine, en 2022.
Si la démarche est intéressante, au moins autant que les résultats, quelques éléments basiques permettent toutefois d’émettre quelques réserves.
À qui profite l’étude ?
De manière superficielle, l’étude présente deux problèmes majeurs. Tout d’abord, l’échantillon étudié est uniquement américain et ne concerne que 2,001 personnes. À l’échelle de la population mondiale, estimée à environ 8 milliards d’être humaines, cet échantillon ne représente que 0.0000025% de la population.
L’Abstrait de l’étude explique pourtant que la littérature sur le sujet étant peu diverses, l’opportunité d’une étude plus large et plus représentative était intéressante :
« Cependant, cette littérature existante emploie généralement de petits échantillons non représentatifs de répondants et examine seulement un petit nombre de variables indépendantes dans chaque étude donnée. Cela présente l’opportunité de tester davantage les résultats précédents ainsi que d’effectuer des analyses exploratoires plus larges, y compris des enquêtes descriptives plus approfondies sur les propriétaires de crypto-monnaies. »
Le second grand problème est politique. Bien malgré la mention précisant que « les auteurs ont déclaré qu’il n’existe pas d’intérêts concurrents », les choses sont plus subtiles.
Cette étude a été financée par la National Science Foundation. Si l’agence fédérale se revendique indépendante, elle compte parmi ses membres de nombreuses personnalités siégeant également au congrès américain, y compris Elizabeth Warren, éternelle ennemie des crypto-monnaies parmi d’autres.
Ainsi, si l’étude semble concrète, elle reste à prendre avec des pincettes. Il est fort probables que certains psychopathes détiennent des crypto-monnaies. Néanmoins, il reste très peu probable qu’une part importante des détenteurs de crypto-monnaies ne souffrent de psychopathie.
Sources : Les corrélats politiques, psychologiques et sociaux de la propriété de crypto-monnaies
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Romaric Saint Aubert
Journaliste
