L’horizon tumultueux de l’échange de cryptomonnaies FTX s’assombrit davantage avec l’annonce de la cession de sa filiale américaine LedgerX, spécialisée dans les produits dérivés sur cryptomonnaies, à M7 Holdings, une société d’investissement basée aux îles Caïmans. Cette décision, surprenante en apparence, survient alors que la possibilité d’une relance de l’exchange est en discussion depuis janvier.
FTX cède LedgerX et ses 3 licences à un conglomérat
FTX avait acquis LedgerX en août 2021 pour renforcer son offre de contrats à terme et d’options réglementés aux États-Unis. LedgerX est en effet l’une des rares plateformes à détenir les licences nécessaires de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC) pour proposer ces produits aux investisseurs institutionnels et particuliers. Entretemps, l’empire FTX s’est effondré et a été placé sous un régime de faillite propre aux Etats-Unis (le Chapitre 11).
LedgerX faisait partie des rares filiales rentables du groupe. L’activité est donc cédée à M7 Holdings, une filiale de Miami International Holdings (MIH), contre un chèque de 50 millions de dollars. L’accord doit encore être approuvé par le tribunal des faillites.
Le montant n’est pas anodin. 50 millions reflètent assez bien l’intérêt des licences détenues par LedgerX et surtout leur rareté. Peu de plateformes de trading de cryptomonnaies ont réussi par passer par les fourches caudines du régulateur US et obtenir :
- Une licence de bourse de contrats à terme (designated contract market ou DCM), qui autorise LedgerX à coter des contrats à terme sur des matières premières.
- Une licence de chambre de compensation (derivatives clearing organization ou DCO), qui autorise LedgerX à fournir des services de compensation pour des contrats à terme, des options sur contrats à terme et des swaps (qui incluent des options sur des matières premières) entièrement collatéralisés.
- Une licence de plateforme d’exécution de swaps (swap execution facility ou SEF), qui autorise LedgerX à négocier des swaps sur des matières premières.
Pourquoi vendre maintenant, après avoir récupéré 7,3 milliards de dollars d’actifs ?
C’est une question que l’on peut se poser. Il semble que FTX ait décidé de vendre LedgerX pour deux raisons principales. La première tient bien sûr à la liquidation en cours prévue par le Chapitre 11 de la loi fédérale sur les faillites. FTX est en faillite depuis novembre 2022 et doit plus de 3 milliards de dollars à ses clients et à ses fournisseurs de liquidité.
Mais d’autre part, la vente de LedgerX peut aussi être vue comme une tentative d’éviter certaines poursuites judiciaires et les sanctions réglementaires, car FTX est accusé de fraude et de blanchiment d’argent par les autorités américaines. Ces dernières avaient même lancé une task force pour retrouver les fonds disparus de FTX et ont envoyé des agents de la CFTC chez LedgerX pour surveiller ses activités peu après la faillite de l’empire fondé par Sam Bankman-Fried.
FTX ne se débarrasse pas pour autant de tous les problèmes juridiques liés à LedgerX en la cédant à M7 Holdings. En effet, FTX est toujours sous le coup d’une enquête criminelle des autorités américaines, qui l’accusent d’avoir détourné des fonds de ses clients vers sa société sœur Alameda Research, dont LedgerX était aussi la filiale. FTX est également poursuivi par plusieurs clients de LedgerX, qui réclament le remboursement de leurs fonds bloqués sur la plateforme de trading de produits dérivés.
Pendant ce temps, John Ray et ses liquidateurs font des progrès significatifs depuis janvier pour récupérer 7,3 milliards sur l’argent perdu dans les méandres de FTX. Ils ont notamment conclu un accord de coopération avec les liquidateurs des Bahamas, qui avaient saisi plus de 3,5 milliards de dollars en actifs cryptographiques appartenant à FTX. Un travail de diplomatie plutôt réussi, car les autorités des Bahamas avaient contesté la compétence du tribunal des faillites américain sur les actifs détenus par FTX International.
Sources : Decrypt
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David Rajaonary
