
Depuis quelques jours, le Web3 ne vit plus qu’autour de la faillite de Genesis, dernier domino en date de la contagion FTX. Il faut dire que la chute de la plateforme préférée des institutionnels pourrait perturber le début de retournement que connaît le marché. Sur Twitter, petit épicentre de la communauté crypto, les commentaires ont rapidement fait florès, notamment après la révélation de l’ampleur des dettes de la plateforme.
Et au final, ce sont les avocats qui gagnent
Genesis just filed for chapter 11.
Bankruptcy lawyers making bank on crypto bankruptcies.
— Coin Bureau (@coinbureau) January 20, 2023
Le média Coin Bureau rappelle qu’au milieu de tout ce tumulte, seuls les avocats spécialisés en faillite en ressortiront gagnants. Et ce, quelle que soit l’issue de la restructuration de la plateforme.
Jusqu’ici assez méconnue en France, Genesis Trading fait pourtant partie de l’écosystème crypto depuis aussi longtemps que Kraken par exemple. Lancée en 2013, la plateforme basée à New York est ce qu’on appelle un “broker over the counter (OTC)”. Cela signifie que les transactions se font selon un système de gré à gré, dans un cadre juridique clair (la plateforme est autorisée et régulée).
Des particularités qui ont rapidement fait de Genesis la plateforme préférée des grands investisseurs. Cette dernière pouvait aisément traiter des transactions avec des volumes importants avec des contreparties déjà prêtes à absorber les ordres d’autres acteurs. Genesis pouvait également prêter d’importantes sommes à des fonds spéculatifs crypto, dont le défunt fonds singapourien Three Arrows Capital (3AC).
Une dette de 3,6 milliards de dollars … et des liaisons dangereuses
Genesis bankruptcy is going to reveal the entire crypto leverage cycle.
Enjoy. pic.twitter.com/X9zduPzlQY
— Alfa (@alphaketchum) January 20, 2023
Genesis doit 3,6 milliards de dollars à ses 50 premiers créanciers. Et très justement, l’analyste @alphaketchum rappelle les liaisons dangereuses entre crypto-bourses, plateformes de lending et jusqu’aux échanges décentralisés. Les acteurs de l’écosystème se prêtent entre eux. Or, plus les liens se tissent, plus le risque de contagion en cas de faillite devient élevé.
Bankrupt #crypto companies 2022-2023:
• Three Arrows Capital
• Celsius Network
• Terraform Labs
• Voyager Digital
• Core Scientific
• Babel Finance
• Hodlnaut
• Genesis
• BlockFI
• Zipmex
• FTX— Watcher.Guru (@WatcherGuru) January 20, 2023
Rappelons que si Genesis Global Capital, la holding qui chapeaute Genesis Trading, sombre, c’est principalement à cause de 3AC et de FTX. Il est vrai que ses difficultés ont commencé en juillet dernier, lorsqu’elle avait dû faire une croix sur les 2,3 milliards de dollars prêtés au fonds basé à Singapour. En y ajoutant les retraits massifs de ses clients, Genesis n’a pas eu d’autre choix que de suspendre les retraits.
Digital Currency Group, la prochaine faillite de l’écosystème ?
4/n – Barry is desperately trying to save his DCG empire by ring fencing out Genesis and letting it fail. However, creditors are unlikely to let him off the hook, especially since Genesis has fraudulently shown a false balance sheet to people who lent money to them
— degentrading (@hodlKRYPTONITE) January 20, 2023
Cependant les documents de faillite nous en apprennent un peu plus sur les mouvements de fonds entre Genesis et sa maison-mère, le Digital Currency Group. Celle-ci devait la renflouer, ce qu’elle a fait, mais avec l’aide de procédés comptables essentiellement cosmétiques et de mécanismes d’ingénierie financière.
5/n – What do i mean by false? It's the promissory note that DCG gave to Genesis to allow it to appear healthy from an accounting standpoint – and its inclusion as a "current asset" to dress up the balance sheet. At this point, @BarrySilbert should go to jail. He's a scammer.
— degentrading (@hodlKRYPTONITE) January 20, 2023
Ainsi ces différents renflouements ne consistaient pas tant en cash frais qu’en obligations à terme, que Genesis pouvait par la suite escompter auprès de ses banquiers. On apprend par exemple que DCG doit à Genesis 575 millions de dollars en prêts échéant en mai prochain, ainsi qu’un billet à ordre de 1,1 milliard de dollars échéant en juin 2032 … mais qui selon plusieurs sources serait exigible sur demande !
Le billet à ordre de 1,1 milliard de dollars, qui vient à échéance en 2032, représente la prise en charge par DCG des dettes dues à Genesis par Three Arrows Capital dans le cadre de leur défaut en juin 2022. DCG a accepté de céder et d’échanger le prêt non garanti de Genesis de 1,1 milliard de dollars auprès de Three Arrows Capital, le dont la reprise était très incertaine, avec le billet à ordre de la DCG. DCG n’a pas reçu d’espèces, de crypto-monnaie ou d’autre forme de paiement pour le billet à ordre.
Une vente forcée d’une partie du fonds Grayscale Bitcoin Trust (GBTC) ?
6/n – Creditors pursuing DCG will probably look at DCG's stash of GBTC and the mgmt fee share rev of Grayscale. At this point, the hole is so huge that both assets are unlikely to cover the gap. However, the qn remains – when will Barry be forced to sell the GBTC to raise cash?
— degentrading (@hodlKRYPTONITE) January 20, 2023
L”empire crypto du Digital Currency Group inclut non seulement Genesis mais aussi Grayscale, le gestionnaire de la plus importante fiducie Bitcoin : le Grayscale Bitcoin Trust (GBTC). Celui-ci détient en sous-jacent plus de 634 000 BTC. DCG détient environ 9,38% des parts de Grayscale, en tant que premier actionnaire. Son PDG, Barry Silbert, pourrait donc être forcé par ses créanciers à vendre sa participation dans Grayscale pour retrouver de l’argent frais.
Autre option, commentée par @hodlKRYPTONITE : la “vente” des droits de gestion de Grayscale sur le GBTC. Qu’est-ce que cela signifie ? Tout simplement que Grayscale pourrait passer la main à un autre gestionnaire professionnel sur le GBTC, contre un montant payé d’avance (le nouveau gestionnaire percevant désormais les frais de gestion). Récemment les fonds Osprey Funds avait d’ailleurs envoyé une lettre ouverte aux actionnaires de la société DCG pour proposer ses services. Idem pour la société de gestion Valkryie Investments, qui s’est proposée mais a rapidement été éconduite par Barry Silbert.
Nos plus récents décryptages sur la faillite de Genesis :
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