Avec la guerre ayant lieu en Ukraine, plusieurs experts pensent que la blockchain mêlée à une solution de stockage décentralisé pourrait aider à lutter contre les crimes de guerre en préservant l’anonymat de ceux qui les dénoncent.
En effet, des inspecteurs des droits de l’homme mandatés par les Nations Unies ont confirmé récemment que des crimes de guerre ont eu lieu en Ukraine par les forces russes. Ainsi, une Commission Internationale a été mise en place en Ukraine depuis 2022 pour fournir un cadre aux Nations Unies afin de pouvoir reporter tout éventuel crime de guerre constaté.
Il s’avère que la blockchain pourrait être un outil se démarquant une fois de plus notamment pour sa capacité à préserver l’anonymat dans de telles situations dans le but de faciliter les reports sans aucun risque.
La situation en Ukraine
Les preuves sont là : des crimes de guerre ont eu lieu en Ukraine suite à l’invasion de la Russie. Erik Møsen, président de la Commission Internationale Indépendante d’Enquête concernant l’Ukraine a déclaré dans un article de l’ONU :
Des enquêteurs ont visité 27 villes et interviewé plus de 150 victimes et témoins à ce sujet. De plus, des sites de destruction, des lieux de détention et de torture, des restes d’armes ainsi que des tombes ont été inspectées.
Bien qu’un rapport ait eu lieu permettant de mettre en lumière ces crimes de guerre en Ukraine sous la supervision de l’ONU davantage d’outils et protocoles sont nécessaires pour définir correctement ces rapports ainsi que les témoignages à ce sujet.
De plus, il est important de pouvoir conserver efficacement ces preuves sur le long terme et c’est là que la blockchain intervient potentiellement dans ce procédé comme le pensent plusieurs experts de l’industrie des crypto-monnaies.
Les crypto-actifs représentent un investissement risqué.
Des technologies déjà existantes
La blockchain pourrait être la solution idéale tout simplement parce que cela se fait déjà à moindre mesure. En effet, Jaya Klara Brekke, officier stratégie à Nym, une plateforme utilisant la blockchain Cosmos servant à protéger de façon privée diverses applications dispose d’un outil du nom de AnonDrop.
D’après Jaya Klara Brekke le but est d’améliorer cet outil afin de permettre à n’importe qui d’envoyer des données de façon anonyme :
Le but est de permettre à AnonDrop de devenir l’outil démocratisé pour rassembler les preuves pouvant être utilisées pour poursuivre tous ceux ayant bafoué les droits humains dans des crimes de guerre. Avec la situation actuelle en Ukraine, un tel outil serait nécessaire dans le seul but de rassembler les documents et la possibilité de partager les preuves de façon anonyme.
Un tel outil a pour but de protéger les utilisateurs en les mélangeant entre plusieurs personnes à l’aide d’un système de chiffrage faisant en sorte que toutes les données semblent identiques. Ainsi cela empêche la surveillance des données ou la possibilité de récupérer les IP des utilisateurs utilisant un tel service.
Bien que AnonDrop ne soit pas complètement opérationnel dans le cadre de l’Ukraine, il fonctionne déjà pour permettre à ses utilisateurs de partager des données de façon anonyme. Ensuite, l’ensemble de ces documents se retrouvent hébergés sur une plateforme décentralisée telle que Filecoin.
Ainsi, un tel outil mêlant blockchain et décentralisation semble idéal dans le contexte actuel de la guerre en Ukraine. Notamment avec l’occupation russe rendant difficile la vérification de toutes les preuves et témoignages. Un tel système permettrait d’éviter à tout témoin de craindre d’éventuelles représailles.
Un travail en cours
Quand bien même AnonDrop a du potentiel pour une telle tâche, le projet n’en est qu’à ses débuts. Par exemple l’interface de l’outil pour les utilisateurs n’est pas encore entièrement disponible et un système doit être mis en place afin de vérifier l’authenticité des images envoyées sur le réseau.
En effet, d’après Ahmed Ghappour conseiller général pour Nym et professeur associé en lois à l’université de Boston, être en mesure de prouver l’authenticité des images est indispensable. Notamment parce que la Russie est experte en la matière pour contester la véracité des preuves notamment parce qu’ils utilisent de nombreuses campagnes de désinformation ainsi que du deepfake.
Ainsi pour Ghappour afin de pouvoir recevoir ses épreuves dans un tribunal, AnonDrop doit être au préalable capable de les vérifier. Des solutions existent déjà telles que SecureDrop, mais dans un tel cadre d’action, il faut définir un système de vérification bien plus poussé ce qui demande le développement de nouvelles méthodes.
Il ajoute :
Nous voulons que le système de vérification des images soit un processus davantage démocratisé tout en allant plus loin afin que cette option soit accessible à tous.
L’avenir
Une fois un tel outil complètement développé, il sera plus facile de se rendre au tribunal afin de juger ces crimes de guerre selon Brittany Kaiser, un expert dans les droits humains. D’après cette dernière, ce genre d’application permettra aussi aux témoins de se sentir plus en sécurité de par le fait qu’ils seront entièrement anonymes en utilisant un tel processus.
C’est très souvent le risque et la peur qui empêchent les victimes ou les témoins de parler de par la crainte de représailles surtout avec le contexte actuel en Ukraine où la situation est loin d’être résolue.
Au-delà de AnonDrop, d’autres applications sur la blockchain sont en développement avec en tête un but similaire. C’est notamment le cas avec Starling Labs. Bien entendu, dans l’ensemble de ces projets l’étape la plus complexe reste de confirmer la réalité des images rapportées.
Encore une fois les technologies de la blockchain montrent leur utilité dans des secteurs très variés. Bien que Tornado Cash ait disparu, Vitalik Buterin lui-même aimait utiliser la plateforme afin de faire des donations anonymes pour aider l’Ukraine dans le but de protéger ceux qui recevaient ces dons.
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Emmanuel Mounier
Expert en Crypto-monnaie
