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Quel rôle joue Sullivan & Cromwell, le cabinet au cœur des révélations de Sam Bankman-Fried ?

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On le pensait occupé à préparer sa défense devant les tribunaux de New York pour les huit chefs d’accusation dont il se déclare non coupable. Mais Sam Bankman-Fried a décidé de surprendre à nouveau. Dans un billet de blog, celui-ci raconte à sa manière la chute de FTX et ses prémices. Une mise en lumière de certains dessous de la faillite, qu’il déclare n’avoir jamais souhaité, confiant en la capacité de la plateforme à se renflouer en quelques semaines, à coups de tours de table. Morceaux choisis.

Un rôle particulièrement trouble attribué au cabinet Sullivan & Cromwell

Énième affront ou tentative tardive de faire la lumière ? Le billet de blog est assurément inhabituel étant donné que Sam Bankman-Fried en est aux premiers jours de sa défense contre des poursuites au pénal et au civil intentées par le gouvernement américain. Rassurez-vous, il ne compte pas en rester là et ne compte pas se faire bâillonner, puisqu’il a promis des révélations supplémentaires à venir :

“J’ai beaucoup plus à dire – sur les raisons pour lesquelles Alameda n’a pas réussi à se protéger, ce qui s’est passé avec FTX US, ce qui a conduit au processus du chapitre 11, S&C, et plus encore. Mais au moins, c’est un début”

Sullivan & Cromwell, retenez le nom car dans l’ombre de ce cabinet couve peut-être une partie des dessous particulièrement troubles de l’affaire FTX. Car SBF accuse le cabinet d’avoir fait pression sur lui pour qu’il demande la mise en faillite protégée (le chapitre 11 du Code fédéral des faillites, ndlr) de la plateforme et de toutes ses filiales, y compris des filiales pourtant solvables.

Bankman-Fried affirme qu’il a obtenu un financement potentiel “pour aider à rembourser les clients en intégralité” après avoir accepté de passer la main à John Ray au poste de PDG. Il a tenté de revenir sur sa décision mais les liquidateurs lui ont fait comprendre qu’il était trop tard. La suite est connue : John Ray a déposé une demande de mise en faillite le 11 novembre, pour bénéficier des règles du chapitre 11, et a nommé Sullivan & Cromwell comme principal conseil de la plateforme.

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Une pression pour liquider la plateforme, au lieu de remettre l’activité à flot

Sullivan & Cromwell, un cabinet d’avocats désormais principal conseil de la plateforme FTX et de John Ray

Bankman-Fried affirme avoir préparé ces révélations en vue de son témoignage devant le Congrès américain, prévu le 13 décembre. Un témoignage qui n’a jamais été possible tout simplement parce qu’il a été interpellé à son domicile la veille de son départ pour les Etats-Unis. Forbes a retranscrit le “brouillon” manuscrit de ce témoignage (voici le lien vers le document Google) et en a résumé “les 11 passages les plus intéressants” dans un article.

SBF y raconte la pression qu’il avait subie de la part du cabinet pour déposer rapidement le bilan. Car à l’époque, Sullivan & Cromwell n’était que l’un des cabinets d’avocats employés par le jeune patron pour le conseiller. Les avocats travaillaient sous la supervision de l’avocat attitré de la plateforme, Ryne Miller, un ancien de … Sullivan & Cromwell, débauché à grands frais en août 2021.

Ainsi SBF déclare qu’il avait à sa disposition 19 pages de captures d’écran montrant l’étendue de la pression psychologique, à la limite du chantage :

“Ils (les messages de pression, ndlr) vont de catégorique à mentalement déséquilibré (…) Ils ont également appelé plusieurs de mes amis, collègues et membres de ma famille, les pressant à faire pression sur moi à leur tour pour que je dépose le bilan. (…) Certains ont été durement marqués sur le plan émotionnel par toute cette pression. Certains d’entre eux sont venus vers moi en pleurant”

Sullivan & Cromwell ont donc nommé John Ray, rendu célèbre pour son travail de liquidateur après la faillite du courtier américain en énergies Enron, emporté lui aussi des manipulations financières de grande ampleur. Aux premières lueurs de la journée du 10 novembre, SBF déclare avoir été réveillé pour cliquer sur un lien DocuSign pour nommer J. Ray en tant que PDG de l’entreprise “contre son meilleur jugement” :

“Moins de 10 minutes plus tard, j’ai reçu une offre de financement potentielle de milliards de dollars pour aider à rembourser les clients en intégralité. (…) Quelques minutes plus tard, j’ai demandé à mon avocat d’annuler le document ; il était devenu clair pour moi que ce n’était pas la meilleure voie à suivre. … Mon avocat m’a informé quelques minutes plus tard qu’il était trop tard.”

Bankman-Fried a été surpris d’apprendre dans la journée que J. Ray et son équipe de liquidateurs avaient demandé à bénéficier des règles du chapitre 11 pour toutes les entités de FTX, “y compris une entité américaine totalement solvable, FTX US”

Un cabinet déjà dans le viseur de quelques élus américains

James Bromley (S&C) et John Ray (FTX) à l’entrée d’un tribunal de New York – Wall Street Journal (c)

Ce n’est pas la première fois que l’on entend parler de James Bromley, associé chez Sullivan & Cromwell et chargé de défendre les intérêts de la plateforme déchue. A vrai dire, un quatuor de sénateurs américains a récemment remis en question le rôle de ce cabinet comme principal conseil des liquidateurs, dans une lettre officielle. Et pas seulement pour ses honoraires, estimés à plus de 2100 dollars de l’heure

La lettre, adressée au juge John Dorsey du tribunal américain des faillites du district du Delaware, est signée des sénateurs Cynthia Lummis (Wyoming), Elizabeth Warren (Massachussets), Thom Tillis (Caroline du Nord) ainsi que John Hickenlooper (Colorado). Elle soulève un potentiel conflit d’intérêts pour le cabinet, qui a réalisé des travaux juridiques pour le compte de FTX en 2021 et le représente maintenant en faillite.

Les sénateurs se demandent notamment si les avocats du cabinet sont en mesure d’enquêter efficacement sur leurs partenaires actuels et anciens qui ont joué un rôle central dans la gestion de FTX :

“Étant donné que les conseillers juridiques sont souvent au cœur des scandales financiers majeurs, étant donné leur rôle dans la rédaction des accords financiers, les pratiques de conformité en matière de gestion des risques et les contrôles d’entreprise, il est parfaitement raisonnable d’avoir des inquiétudes quant à l’impartialité et à la manière dont Sullivan & Cromwell abordera toute enquête sur FTX.”

Il faut savoir que FTX travaillait à ses débuts avec le cabinet Fenwick & West, bien connu des patrons de la Silicon Valley car principal conseil des plus grosses startups technologiques locales. Cependant FTX a progressivement basculé chez Sullivan & Cromwell, notamment dans le cadre d’une activité de lobbying auprès de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC) – le régulateur en charge des cryptomonnaies aux Etats-Unis. On apprend d’ailleurs que plus de 8,5 millions de dollars ont été facturés à FTX rien que sur l’année 2021.


Sources : SBF Substack, Forbes, Wall Street Journal


Un autre article à lire sur le billet de blog de Sam Bankman-Fried : SBF tente d’expliquer les raisons de la faillite de FTX

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Romaric Saint Aubert Crypto-journaliste

Romaric Saint Aubert Crypto-journaliste

Biographie

Romaric est journaliste pour Cryptonaute. Après un passage en faculté de lettres modernes, il s’oriente dans un domaine tout à fait différent, tout en gardant l’œil rivé sur les crypto et l’actualité de l’époque. Il investit alors dans son premier actif numérique : le bitcoin (BTC).

Majoritairement intéressé par Bitcoin, il s’est diversifié plus tard en se penchant également sur le web3, les NFT, les crypto-monnaies et la FinTech. Investisseur aguerri, il est capable d'orienter son entourage et ses lecteurs. Son expérience au sein de l’écosystème crypto et sur la blockchain lui permettent de proposer une actualité précise et experte à ses lecteurs, tout en gardant un recul et une objectivité indispensable à son activité.

Romaric se rend régulièrement en conférence ou à divers événements crypto dans toute l'Europe, notamment aux conférences Bitcoin, au Zebu Live ou aux événements relatifs à la blockchain. Fasciné par ce secteur en plein développement, il aime découvrir de nouveaux projets, apprécie l’innovation, et se laisse porter par son enthousiasme et sa curiosité.

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