
Dans le contexte actuel du marché crypto, les investisseurs semblent chaque jour s’accrocher aux signaux positifs émis par les grands acteurs, qui tentent de rassurer les masses en vantant tour à tour leur solidité supposée. En quoi consistent ces arguments avancés par les grands noms du secteur ?
Les audits, arme de communication des exchanges et projets cryptos
Dans le sillage de l’affaire FTX, la Securities and Exchange Commission (SEC, équivalent de l’Autorité des Marchés Financiers en France), semble vouloir mettre son nez avec de plus en plus d’insistance dans les affaires de la planète crypto. Et sa dernière cible se trouve être la communication des entreprises du secteur, en particulier en ce qui concerne leur présumée solvabilité.
La preuve de réserve est l’arme de communication numéro un des exchanges pour prouver leur bonne gestion. En résumé, cette donnée est représentée sous la forme d’un pourcentage, censé indiquer si les réserves de l’entreprise sont supérieures à son passif. En d’autres termes, si l’entreprise dispose d’assez de capitaux pour faire face à ses dettes. Cela permet de juger si le dépositaire opère une bonne gestion de vos fonds.
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Comment est déterminée la preuve de réserve ?
Pour certifier leur preuve de réserve, les exchanges font appel à des auditeurs. Le plus connu, officiant également en dehors des écosystèmes cryptos, est le français Mazars. On peut aussi citer Arkham, ou encore l’exchange Kraken, qui fournit également des prestations d’audit pour différents projets cryptos.
Ces auditeurs font passer aux exchanges ces fameux tests de réserves. À ce titre, ils analysent la structure financière des entreprises, ainsi que leur santé comptable. Les résultats de ces audits se présentent sous forme de pourcentage indiquant le niveau de réserve par crypto-monnaie.
Par exemple, le géant Crypto.com a publié ce mois-ci les résultats de son dernier audit mené par Mazars. Celui-ci indique que la preuve de réserve de l’exchange s’établit à 102% pour le Bitcoin et 101% pour Ethereum. Cela signifie que la société détient une somme en Bitcoin équivalente à 102% des Bitcoins détenus par ses clients (il s’agit d’un exemple, les audits présentent des preuves de réserve pour chaque crypto).
La preuve de réserve est donc le standard pour certifier de la solvabilité des plateformes d’échange. Du moins jusqu’à aujourd’hui, puisque de puissantes institutions, et des observateurs de renoms, commencent à critiquer cette donnée.
Pourquoi la SEC ne veut plus se fier aux preuves de réserve ?
Il est troublant de constater la chronologie de certains évènements. Suite à la chute et au vent de panique causé par FTX, les exchanges ont annoncé ces dernières semaines, les uns après les autres, faire appel à des auditeurs (Mazars pour la plupart) pour témoigner au monde de leurs preuves de réserves. Mazars semblait donc en lice pour devenir le meilleur allié des exchanges et ramener la confiance sur le marché.
Mazars, un poids lourd qui prend des pincettes.
Néanmoins, il y a quelques jours, le 15 décembre, Mazars annonçait mettre un terme à son activité crypto. Ou du moins, la mettre en pause. Cela s’est produit alors que l’audit que la firme avait réalisé pour Binance, le plus grand exchange centralisé au monde, commençait à être pointé du doigt, pour son manque de précision, et ses conclusions pour le moins étranges.
Certains observateurs affirmaient sans détour que la surcollatéralisation de l’exchange montrée par l’audit de Mazars était tout simplement fabulatoire, affirmant que les niveaux de réserve de l’exchange pourraient être plus inquiétants.
L’affaire avait pris tant d’ampleur sur les réseaux sociaux, que l’auditeur français, référence mondiale des procédures d’audit, avait du annoncer ce suspens des activités cryptos. Cette annonce avait d’ailleurs immédiatement fait chuter les tokens natifs de Binance, KuCoin, et Crypto.com (BNB, KCS et CRO) de 3 à 5%.
L’auditeur Mazars a-t-il eu peur d’entacher son image ? Ou a-t-il craint d’éventuelles sanctions de la part des grandes institutions de contrôle ? En effet, la SEC semble de moins en moins enclin à laisser passer les certifications parfois bancales de ces géants de la crypto.
La SEC, peu convaincue par les audits
L’autorité de contrôle américaine ne s’en cache pas : elle n’est pas du tout friande des audits de preuves de réserve. L’un de ses dirigeants, Paul Munter, les qualifie même de diversion destinées à cacher les réelles tensions de liquidités subies par les exchanges.
Même si tout investisseur crypto aimerait que les pouvoirs publics restent loin de nos chères blockchains, on peut comprendre la SEC. Imaginons que Sam Bankman Fried ait trouvé une solution pour renflouer FTX avant que le scandale n’éclate. Nous n’aurions jamais su que nos actifs étaient passés à deux doigts de la catastrophe ! Et c’est probablement ce qui se joue chez certains exchanges, qui brandissent pourtant leurs preuves de réserves comme des garanties inébranlables.
Ainsi, la SEC prévient :
Il est clairement possible, pour ne pas dire probable, que les exchanges parviennent à « maquiller » temporairement leurs comptes afin de tromper l’auditeur.
Ce dernier n’est pas non plus épargné par l’institution américaine, qui lui reproche de manière générale de ne traiter qu’en surface des trésoreries des exchanges. Dans ce cadre délétère, on souligne l’initiative de certaines plateformes telles qu’OKX qui publie de lui-même des preuves plus approfondies de sa solvabilité.
Pour de nombreuses institutions et acteurs majeurs, réglementer les crypto-monnaies est la priorité numéro une pour faire évoluer cette industrie dans le bon sens.