Si l’on a tendance à penser que les marchés européens suivent les mêmes directions que les marchés américains, il semblerait que ce soit l’inverse en ce qui concerne les règlementations. Un élément qui a été largement documenté et qui porte le nom d’effet de Bruxelles. Voyons ensemble dans quelles mesures cet effet pourrait aussi émerger sur le marché des cryptos.
Qu’est-ce que l’effet Bruxelles ?
Pour mieux comprendre ce qu’est l’effet Bruxelles, expliquons son origine avec un exemple : la protection de la vie privée. Dans la plupart des juridictions du monde, le droit à la vie privée est aujourd’hui protégé juridiquement. Outre Atlantique, celui-ci est sacralisé par le quatrième amendement tandis qu’il relève de l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme. Si les définitions peuvent différer selon les juridictions, la plupart des pays accordent une grande importance à ce droit jugé fondamental.
Dans les années 1970, la multiplication des données et leurs publications a commencé à constituer un vrai problème pour la protection de la vie privée. Ce phénomène a notamment été identifié à la fin des années 1970. La prise de conscience s’est ensuite accélérée lors de la décennie suivante. En Europe, il faudra attendre 1995 pour que l’UE introduise une directive sur la protection des données. Une directive qui garantissait alors, certains droits fondamentaux dans le traitement des données personnelles.
Amorcé sous la forme d’une directive et non d’une loi coercitive, la question du respect de la vie privée s’est peu à peu ancré comme une obligation. Une obligation qui a abouti en 2018 au fameux RGPD (règlement générale sur la protection des données). Promulgué par l’Europe, le système RGPD est aujourd’hui une référence mondiale. Une référence sur laquelle se basent d’autres juridictions comme les États-Unis. Ce phénomène d’adaptation des autres juridictions au droit européen porte aujourd’hui le nom “d’effet Bruxelles”. L’effet Bruxelles suggère donc que l’Union Européenne est souvent un précurseur en ce qui concerne l’établissement de normes. Si l’exemple fonctionne avec la protection des données, il est aussi visible sur d’autres domaines comme le droit de l’environnement ou encore l’épineuse problématique des discours haineux en ligne.
Un effet Bruxelles sur la règlementation des cryptos et de la DeFi ?
Pour beaucoup, nous pourrions voir l’histoire et le procédé en 3 phases se répéter sur le champ des actifs numériques et de la DeFI :
- Phase 1 : Directive européennes
- Phase 2 : Règlementation européenne
- Phase 3 : Norme règlementaire mondiale
En Europe, nous en sommes à la phase 1 avec la directive européenne MiCA. Mais MiCA pourrait rapidement devenir une règlementation.
Au pays de l’oncle Sam, les actifs numériques se situent à l’heure actuelle dans une zone grise. Et ni la SEC (Securities and Exchange Commission) ni la CFTC (Commodities Future Trading Commission) ne souhaitent spécialement s’occuper de cette classe d’actifs. S’il existe un état ou le débat est vif, il s’agit de la Californie. Le Sénat de l’état le plus peuplé des États-Unis fait d’ailleurs pression sur le sujet de la classification des actifs numériques. Et souhaiterait un amendement au code financier californien, afin d’y inclure les actifs comme le Bitcoin ou l’Ethereum. Mais si elle venait à être adoptée, cette loi ne serait pas applicable avant 2025.
En Europe, la problématique règlementaire a été soulevée il y a plus longtemps. Dès 2020 en ce qui concerne la BaFin, l’autorité fédérale de supervision financière allemande. Un amendement à la loi bancaire a d’ailleurs été mis en place pour mettre au même niveau les titres traditionnels et les actifs numériques. Pour les États-Unis, reste à savoir si l’on optera plutôt pour l’effet Californie ou l’effet Bruxelles.