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Layer 2 : comment fonctionnent les couches secondaires d’Ethereum ?

David Rajaonary
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(Episode 1 sur 5) En soufflant les huit bougies d’Ethereum ce 31 juillet, il devait y avoir peu de doutes dans l’esprit de Vitalik Buterin. Car le protocole qu’il a créé s’est imposé, pour de bon, comme la blockchain de référence. La prochaine étape ? Y faire rentrer le milliard d’utilisateurs, certainement. Mais pour cela, il faudra en faire un réseau avec des cas d’usage réels, durables, quotidiens, banals. Il va falloir dépasser les 15 transactions par seconde actuelles, et passer à plus de 100 000, voire 1 million.

Parmi les solutions privilégiées, figure l’ajout de couches secondaires à Ethereum, les fameux “layer 2”. Découvrons aujourd’hui le premier volet d’une série consacrée à ces nouveaux outils.

💡 Les points-clés

  • Trop instables et dépassant ponctuellement les 40 dollars, les frais de transaction sur Ethereum handicapent les échanges.
  • La création d’une “couche secondaire” permet de soulager la charge de calcul d’Ethereum.
  • Il y a plusieurs technologies possibles, mais le “rollup” tient actuellement la corde.
  • Les deux plus gros rollups sont Arbitrum One et OP Mainnet (Optimism)

 

1. Les pics de transaction, le talon d’Achille d’Ethereum

Dans l’histoire du réseau Ethereum, on peut distinguer quatre périodes au cours desquelles les frais de transaction ont explosé, restant pendant de longues semaines à des niveaux rédhibitoires :

🗓️ Le marché haussier fou de 2016 – 2017

🗓️ L’explosion de DeFi à l’été 2020

🗓️ L’explosion des NFT à l’été 2021

🗓️ L’ouverture du monde virtuel Otherside Yuga Labs au printemps 2022

Difficile à croire, mais dans la soirée du samedi 30 avril 2022, un utilisateur a acheté un NFT à 25 dollars en payant des frais de … 3300 dollars 😱

A chaque fois, les utilisateurs d’Ethereum font face au même cercle vicieux : un trafic monstre, un engorgement du réseau, l’explosion des frais de transaction. Comment l’expliquer ?

Tout simplement parce qu’Ethereum fonctionne sur un système d’enchères. Par défaut, les transactions avec les frais les plus élevés sont choisies en premier par les validateurs du réseau.

Les transactions avec des frais plus faibles doivent attendre que le réseau se désengorge … ou augmenter leurs frais pour être traitées plus rapidement.

Frais de réseau exprimés en Gwei (unité de gaz) : observez les pics en 2017, 2020, 2021 et 2022 ! (Graphique Etherscan.io)

 

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2. Les L2 Rollups, la meilleure solution pour désengorger Ethereum

Pour faire baisser les frais et soulager la pression sur Ethereum, c’est la technologie “rollup qui semble la plus prometteuse à l’heure actuelle. La plupart des fameuses couches secondaires (dites “L2” ou “layer 2”) l’ont adoptée 🫡

En quoi consiste-t-elle ? Un rollup est une couche secondaire d’Ethereum qui va exécuter le calcul des transactions sur son propre réseau. Une fois cette tâche réalisée, elle publie ses données sur Ethereum, en une seule opération.

L’intérêt ? Regrouper des centaines de transactions en une seule (d’où le nom de rollup = enrouler, grouper), et payer les frais d’une seule transaction pour tout un lot.

En effet, si l’on regroupe les 1000 transactions d’un rollup au sein d’une seule transaction Ethereum coûtant 100 dollars, chaque transaction finit par coûter seulement 0,10 dollar ! 😉

Et cela marche. Actuellement, envoyer des fonds en ETH via le réseau principal Ethereum coûte 1,16 dollar. Sur une couche secondaire telle qu’Optimism, cela vous coûtera à peine 0,03 dollar !

Pour un utilisateur occasionnel lambda, la différence peut paraître anecdotique. Mais pour une institution qui brasse chaque jour des dizaines de millions en ethers, la différence sera capitale.

Deux catégories de rollups sont actuellement disponibles : les Optimistic Rollups et les ZK Rollups.

2.1. Optimistic Rollups

Leur singularité. Ils reposent sur une philosophie “optimiste”. Chaque transaction est traitée, sans a priori. En revanche, un délai de sept jours s’ouvre après chaque transaction pour que les validateurs vérifient les éventuelles fraudes. Pendant ce temps, les fonds ne peuvent donc pas être retirés du réseau.

Leur intérêt. Ils sont compatibles avec la machine virtuelle Ethereum (EVM), ce qui facilite le travail des développeurs. Plus besoin de re-coder, un protocole comme Uniswap peut être “copié-collé” depuis Ethereum et être lancé sur un rollup comme Arbitrum 👏.

Qui sont-ils ? Voici les principaux L2 conçus en rollup optimiste :

  • ARBITRUM – pèse 5,3 milliards de dollars en valeur immobilisée (TVL)
  • OP MAINNET (ou OPTIMISM) – 2,5 milliards de dollars
  • BASE – 242 millions de dollars

2.2. ZK Rollups

Leur singularité. Les transactions sont validées en une ou deux minutes, grâce à des calculs plus complexes. Une “preuve de validité” est immédiatement enregistrée, il n’y a pas moyen de tricher ! Contrairement aux rollups “optimistes”, les rollups “zk” n’ont pas de délai de vérification, les fonds peuvent être retirés.

Leur intérêt. Plus rapides et moins contraignants que les rollups optimistes, mais aussi plus difficiles à développer. Pour l’heure, les ZK Rollups ne sont pas encore totalement compatibles avec la machine virtuelle d’Ethereum (EVM), et peuvent seulement gérer des transactions simples ou des applications rudimentaires.
Il est donc impossible, pour le moment, de porter toutes les applications de l’univers Ethereum sur un rollup zk 😥.

Qui sont-ils ? Voici les principaux L2 conçus en rollup optimiste :

  • ZKSYNC ERA – pèse 398 millions de dollars en valeur immobilisée (TVL)
  • DYDX – 333 millions de dollars
  • STARKNET – 109 millions de dollars

 

3. Arbitrum et Optimistic, les rollups compresseurs

Le succès des rollups est à mettre au crédit du père d’Ethereum lui-même, Vitalik Buterin. Aux premiers jours de 2021, Vitalik publie un “Guide incomplet sur les Rollups”.

En gros, il ne voit pas d’avenir pour Ethereum à moyen terme autrement que par le biais de cette technologie.

Au moment où l’article commence à faire débat, la valeur totale des fonds brassés par les rollups et autres couches secondaires d’Ethereum naviguait autour de 75.000 ETH (l’équivalent de 78 millions de dollars).

A l’heure où j’écris ces lignes, elle a franchi le cap des 5,81 millions ETH (l’équivalent de 9,62 milliards de dollars).

Comme vous pouvez le voir dans le tableau ci-dessous, les deux rollups optimistes Arbitrum One et OP Mainnet se taillent la part du lion, avec respectivement 55% et 27% de la valeur immobilisée dans les L2.

La question que l’on peut se poser est : Quelles sont les qualités réelles d’Arbitrum❔? En effet, si le coût de transaction est le critère déterminant pour passer les rollups L2 (optimiste / zk) au crible, pourquoi Polygon zkEVM (0,02 dollar par envoi) est-il seulement le dixième le plus utilisé 🤔?

La réponse est que le coût n’est pas la seule variable de l’équation.

Tout en réduisant leurs frais et en augmentant leur vitesse, les blockchains doivent préserver deux propriétés fondamentales : la décentralisation et la sécurité. C’est ce qu’on appelle le trilemme de la blockchain.

À l’heure actuelle, Arbitrum est la couche secondaire d’Ethereum qui satisfait le mieux aux trois exigences :

  • Rapide et peu chère
  • Décentralisée
  • Sécurisée

 

3. Comment ces réseaux secondaires gagnent-ils de l’argent ?

On peut considérer les rollups comme des revendeurs d’espace de blocs sur Ethereum. En clair, ils achètent de l’espace de blocs sur le réseau principal, l’utilisent plus efficacement et le vendent à un prix plus élevé aux utilisateurs de leur réseau secondaire.

Leur profit est issu essentiellement de la différence entre les frais collectés (L2) et les frais qu’elles doivent payer aux validateurs d’Ethereum lorsqu’elles y publient leurs transactions (L1).

Cette année, Arbitrum  réalise en moyenne 1,2 millions de dollars de profits chaque mois. Typiquement, son bilan en fin de mois ressemble à ceci :

De janvier à aujourd’hui, Arbitrum a enregistré 40,8 millions de dollars de revenus 💰. Elle en a utilisé environ 30 millions de dollars en frais de publication de données sur Ethereum 💲.

Pas mal du tout, sachant que les frais sur le réseau sont en moyenne de 0,04 dollar par envoi et de 0,11 dollar par échange. Grâce à une très grosse activité, Juin et Juillet ont par exemple été d’excellents mois.

Optimism n’est pas en reste, réalisant quant à lui en moyenne 500.000 dollars de profits mensuels, bien qu’en en raison de diverses incitations liées à son jeton OP, il a enregistré dernièrement un bilan négatif.

 

4. La guerre des rollups, c’est aussi une affaire de capitaux

La période n’est pas simple pour les projets cryptos. À cause de la chute des marchés, les perspectives sont plutôt incertaines, mais les L2 ont su lever des fonds en 2021-2022, juste avant que la vague baissière ne touche les cryptos de plein fouet :

🗓️ Février 2022 : Polygon Labs (Polygon) lève 450 millions de dollars pile après avoir bouclé le rachat de deux startups spécialisées dans les rollups de type zk, à savoir Mir (pour 400 millions) et Hermez (200 millions),

🗓️ Mars 2022 : OP Labs (Optimism) lève 150 millions de dollars auprès de plusieurs investisseurs dont a16z (le fonds de capital-risque le plus influent dans la galaxie crypto),

🗓️ Mai 2022 : la startup israélienne StarkWare (StarkEx et StarkNet) lève 100 millions de dollars et voit sa valorisation atteindre 8 milliards de dollars !

🗓️ Novembre 2022 : la startup berlinoise Matter Labs (zkSync Era et zkSync Lite) lève 200 millions de dollars,

Au total, les plus startups à la manœuvre derrière les layer-2 ont levé durant 2022 plus d’un milliard d’euros !

Nous voici rendus à la fin de ce premier volet de notre série consacrée aux layer 2. Dans le prochain épisode de cette série, nous découvrirons ensemble tout ce qu’il faut savoir sur les Séquenceurs 💡, un outil central au coeur de la sécurité des rollups.


Sources : Binance Research, L2Beat, L2Fees


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David Rajaonary

David Rajaonary

David est analyste financier indépendant, et décrypte chaque dimanche pour vous l’actualité de la crypto et de la finance de la semaine. Il écrit régulièrement quelques papiers pour analyser des acteurs clés de la DeFi, des stablecoins et des monnaies numériques de banques centrales.

Diplômé en Finance et Comptabilité, David exerce depuis 10 ans dans l’Audit, le Conseil en management et l’Analyse financière. Ses premiers pas dans la crypto datent de 2020, avec l’étude de projets de monnaies numériques de banque centrale (MNBC) et de registres distribués (blockchains privées).

Depuis, David écrit régulièrement sur la percée des projets Ripple (XRP), Stellar Lumens (XLM) et Chainlink (LINK). Dans ses articles, il vous montre comment ces projets blockchain s’immiscent et transforment silencieusement le monde bancaire et celui de l'investissement.

Paiements transfrontaliers, transferts d’argent, bancarisation des populations vulnérables, prêts, tokénisation de titres financiers, tokénisation de biens immobiliers, lutte contre la fraude, sécurité … sont le fil conducteur de ses articles.

(Petit disclaimer : il s’exprime à titre personnel et son traitement de l’actualité ne constitue en rien des conseils d’investissement, ni des incitations à acheter ou à vendre des cryptomonnaies. Les prises de position, critiques et conclusions sont établies toujours dans le respect des principes d’éthique et de transparence journalistiques)

Quand il ne rédige pas sur la crypto, David aime explorer l’histoire de l’Art africain et des civilisations arabes.

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