Voilà bien un sujet sur lequel beaucoup de pro et d’anti-Bitcoin arrivent à se mettre d’accord : pour un certain nombre de personnes, Bitcoin pourrait presque relever du fait religieux. Sentiment d’appartenance à une communauté, croyances et valeurs communes sont autant d’éléments tangibles qui peuvent rapprocher la mère des cryptomonnaies d’une religion. Pour appuyer le propos de cet article, nous nous sommes essentiellement focalisé sur un échange entre les journalistes Salomé Saqué et Nastasia Hadjadji pour le média Blast.
Pourquoi utiliser le terme de “religion” ?
A priori, rien sur le papier ne laisse augurer d’un lien direct entre Bitcoin et la religion. Mis sur pied en 2009 comme pour contrecarrer le système financier, Bitcoin s’appuie plus sur des éléments tangibles et mathématiques que sur des principes mystiques. Mais il est important de voir plus loin la simple articulation du protocole. Et plutôt se concentrer sur des notions liées à Bitcoin : sa philosophie et sa communauté.
Pour mieux comprendre la comparaison qui est parfois mise en avant, tâchons d’abord de définir ce qu’est une religion. Ou du moins d’en aborder les grands principes. Si l’on reprend la définition telle qu’elle est présentée dans le dictionnaire Le Robert, le concept de religion serait le suivant :
La reconnaissance par l’être humain d’un principe supérieur de qui dépend sa destinée ; attitude intellectuelle et morale qui en résulte.
Une seconde définition associe inéluctablement le principe religieux à une notion de croyance. Un élément que l’on retrouve aussi au sein de la communauté Bitcoin dont l’une des croyances principales est de réinventer la monnaie en se débarrassant des tiers. Mais sur certains aspects de la religion, les débats continuent de faire rage. Si la plupart des religions mettent en avant le culte d’une ou de plusieurs personnalités, il semblerait que certains éléments tirent dans l’autre sens concernant Bitcoin avec une sacralisation du principe de décentralisation. Oui, mais quid de Satoshi Nakamoto ?
Satoshi Nakamoto : prophète en son pays
Si les chrétiens ont Jésus, les musulmans ont Allah, les maximalistes du Bitcoin ont Satoshi Nakamoto, le célèbre créateur du Bitcoin. Et là encore, l’idolâtrie portée à celui qui a mis sur pied le livre blanc du Bitcoin est finalement assez proche de ce que l’on retrouve auprès des différentes religions.
À l’instar des récits héroïques et mystiques que l’on peut retrouver au sein des livres sacrés, la construction du personnage de Satoshi Nakamoto s’articule autour d’un story-telling extrêmement puissant. Une puissance de l’écriture qui laisse ainsi parfois à penser que nous avons affaire au “Jésus de la crypto“. Les faits marquants du Bitcoin sont aussi célébrés par la communauté, à l’instar notamment du fameux “Pizza Day”. Pour rappel, le 22 mai 2010, le développeur informatique Laszlo Hanyecz a échangé deux pizzas contre 10 000 BTC. Chaque année, cette date du 22 mai est célébrée par la communauté Bitcoin.
D’autres dates tiennent aussi le haut du pavé auprès de la communauté Bitcoin comme la publication du white paper (31 octobre 2008) ou encore le lancement du réseau (3 janvier 2009). L’adoption du Bitcoin par le Salvador comme monnaie légale (7 septembre 2021) est aussi un élément qui risque bien de rassembler la communauté Bitcoin à chaque date anniversaire.
D’autres éléments autour du storytelling valident encore ce rapprochement entre crypto et religion. Notamment l’omniprésence d’une vision d’apocalypse. Dans le cas de Bitcoin et des cryptos de façon plus large, c’est l’imminence de la fin du système économique traditionnel qui est largement mis en avant. Renforçant au passage le sentiment d’appartenance des membres à la communauté Bitcoin.
Bitcoin : la religion des pros de la tech ?
C’est l’argument notamment avancé par la journaliste française Nastasia Hadjadji qui vise à apporter un éclairage critique sur l’écosystème Bitcoin. Selon elle, la vision idyllique souvent mise en avant, cacherait une part d’ombre. Une part d’ombre personnifiée par le secteur de la tech dont Bitcoin ne serait que l’incarnation d’une manière de penser le monde. D’une certaine manière, le livre blanc du Bitcoin serait au christianisme ce qu’est la Bible ou ce qu’est le Coran à l’islam.
Dans son analyse, Nastasia Hadjadji détaille également comment Bitcoin a réussi à s’imposer dans la société. Et là encore, le fait religieux n’est jamais bien loin puisque la journaliste évoque des méthodes de “conversion” proches du prosélytisme. Car contrairement à ses prédécesseurs, Satoshi Nakamoto a réussi à faire essaimer son concept à des frontières bien plus larges que les “geeks” ayant une certaine appétence pour la cryptographie.
S’il est important de rester critique à l’égard des actifs numériques et de Bitcoin et d’en comprendre les risques et les défauts, la posture consistant à renvoyer Bitcoin au rang de religion nous semble aussi très extrême. Considérer Bitcoin sur ce simple plan, c’est faire fi des problématiques auxquelles certains crypto-actifs peut apporter des solutions. Notamment dans les pays comme l’Argentine ou l’inflation est un fléau depuis des années. Mais c’est aussi considérer que n’importe quelle communauté partage finalement les mêmes principes qu’une communauté religieuse.
Vous pourrez retrouver l’intégralité de l’intervention de la journaliste chez nos confrères de Blast.
Source : Blast
Sur le même sujet :
- Londres : Une mosquée va accepter les dons en bitcoin pendant le ramadan
- Les avocats de Grayscale poussent la SEC à approuver leur ETF Bitcoin au plus vite
- Bitcoin serait moins gourmand que prévu en électricité
Partager
Charles Ledoux
