Mis en avant par des opérateurs comme Tornado Cash, les mixeurs de cryptomonnaies divisent au sein de la communauté crypto. S’ils permettent de renforcer le respect de la vie privée des utilisateurs d’une blockchain, ils permettent également à certaines organisations de dissimuler leurs traces. Faut-il pour autant les interdire ?
Qu’est-ce qu’un mixeur de cryptomonnaies ?
Contrairement à ce que l’on entend encore parfois, les transactions passées sur une blockchain ne sont pas anonymes, mais plutôt pseudonymes. Car si la blockchain permet de préserver l’identité de chaque individu, il est possible de retracer l’ensemble des transactions d’une adresse ou d’un wallet crypto. Pour celles et ceux qui souhaitent ne pas être tracés sur leurs transactions, les mixeurs (ou mélangeurs) cryptos apportent une réponse adéquate.
Concrètement, le mixeur crypto collecte les actifs de plusieurs utilisateurs pour ensuite leur réattribuer en fonction du dépôt effectué. Pour mieux comprendre, prenons un exemple simple. Si 1 000 personnes déposent chacun 1 ETH au sein du mixeur, celui-ci redistribuera les Ethers à chaque membre en fonction de leur mise. Mais il ne redistribuera pas le même jeton. Rendant beaucoup plus difficile le traçage.
Certains mixeurs permettent même de pouvoir retirer les fonds déposés, sur plusieurs périodes de temps. Limitant d’autant plus le traçage des transactions. Pour se rémunérer, le mixeur prélève alors une commission sur les transactions effectuées. Celle-ci est de l’ordre de 1 à 5 % selon les transactions ou selon l’opérateur choisi. À l’instar des bourses ou des plateformes d’échange, il existe des opérateurs centralisés et décentralisés.
Faut-il interdire les mixeurs cryptos ?
Maintenant que vous comprenez un peu mieux le fonctionnement des mixeurs de cryptos, interrogeons nous sur ses utilisations concrètes.
Un outil qui assure une protection de la vie privée
Par sa nature, un mixeur crypto peut permettre de mieux protéger votre vie privée. Un principe que l’on retrouve au sein de l’article 12 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
Nul ne sera l’objet d’immixtions arbitraires dans sa vie privée, sa famille, son domicile ou sa correspondance, ni d’atteintes à son honneur et à sa réputation. Toute personne a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes.
Faut-il interdire les mixeurs crypto ?
C’est le revers de la médaille à ce film d’opacité. S’ils sont majoritairement utilisés par des utilisateurs souhaitant simplement conserver la maitrise de leur vie privée, les mixeurs cryptos sont aussi des outils auxquels recourent certains groupes criminels ou terroristes pour dissimuler leurs activités.
Tornado Cash Co-Founders Accused of Helping Cybercriminals Launder Stolen Crypto.
Learn more: https://t.co/O2qKBzfsSo— FBI (@FBI) September 8, 2023
La plateforme Tornado Cash, l’un des plus célèbres mixeurs de cryptomonnaies a longtemps fait parler d’elle en étant notamment accusé d’avoir contribué à aider des hackeurs nord-coréens du groupe Lazarus, à blanchir pour près d’un demi milliards de dollars d’actifs numériques. En 2022, la plateforme était accusé d’avoir facilité le blanchiment de plus de 7 milliards de dollars d’actifs numériques.
Une étude de Chainalysis publiée en 2022 alertait sur l’utilisation des mixeurs par les organisations criminelles ou terroristes. Selon la plateforme, les adresses considérées comme illicites représentent une part de plus en plus importante dans l’écosystème des mixeurs. En 2021, 12 % des mouvements étaient liés à ces adresses. Une proportion qui représentait 23 % en 2022. Le problème est donc bien réel et les solutions difficiles à trouver. Car d’une certaine manière, les avantages du mixeur crypto constituent aussi ses principaux inconvénients.
Les États-Unis font la chasse aux mixeurs crypto !
Selon les pays, la règlementation autour de ces plateformes diffèrent. Aux États-Unis, elles sont considérées comme étant des plateformes financières. Une classification loin d’être anodine puisqu’elle soumet obligatoirement ces plateformes à la règlementation relative à la lutte contre le blanchiment d’argent et au financement du terrorisme. Et à la nécessité de demander un KYC à chaque utilisateur. Un principe qui va aux antipodes de la promesse de valeur de ces mixeurs crypto.
Dans son procès face à la justice américaine, Roman Storm fait d’ailleurs l’objet de poursuites pour non respect de la règlementation sur le blanchiment d’argent. Un chef d’accusation qu’il rejette comme l’ensemble des griefs formulés à son égard par la justice américaine. Sur de nombreux sujets la question de l’interdiction se pose dès qu’un nombre restreint de personnes l’utilisent à des fins négatives. Néanmoins, impossible de faire l’autruche et de considérer que les chiffres avancés par Chainalysis sont anecdotiques.
Source : ADAN / Chainalysis
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