A l’image de Blender.io (mai 2022) et de Tornado Cash (août 2022), les tempêtes réglementaires n’ont pas épargné les outils d’anonymisation sur la blockchain Ethereum. Touché mais pas coulé, Tornado Cash reste difficilement à flot. Il a tout de même perdu jusqu’à 90% de ses volumes d’échanges, après avoir subi les foudres du Département du Trésor américain. Un récent rapport de TRM Labs fait le point sur l’activité du protocole. Enfin, de ce qu’il en reste.
Août 2022, orage réglementaire sur Tornado Cash et ses développeurs
D’abord les faits.
Le 8 août 2022, un coup de tonnerre est venu tirer l’écosystème crypto de la relative torpeur du marché baissier. Sans crier gare, l’Office of Foreign Assets Control (OFAC) du Trésor américain a placé le service de “mixage de cryptomonnaies” Tornado Cash, sur sa liste noire. Le protocole, mais aussi une quarantaine d’adresses liées, détenant des ethers (ETH) et des USD Coin (USDC).
Le grief ? Tornado Cash fut accusé d’avoir servi à blanchir plus de 7 milliards de dollars en cryptos depuis sa mise en ligne en décembre 2019, pour divers États renégats, à commencer par la Corée du Nord. Roman Semenov et Roman Storm, les créateurs du protocole, ont donc vu leurs voiles se déchirer : le site a été mis hors ligne et le précieux code de son smart contract a été effacé de la plateforme Github dès le lendemain.
Pour les citoyens américains, l’accès à ce service était désormais interdit. Les fournisseurs d’infrastructure blockchain, à l’image d’Infura et d’Alchemy, ont rapidement censuré l’accès à l’application Tornado Cash, en application des sanctions de l’OFAC.
En février 2023, un collectif de six plaignants, financés par Coinbase, ont tenté d’invalider l’interdiction de Tornado Cash. Peine perdue, puisque Roman Storm a été arrêté par le FBI, présenté devant un tribunal de district dans l’ouest de Washington, où il a plaidé non coupable le 7 septembre dernier (avant d’être libéré contre une caution de 2 millions de dollars).
Roman Semenov, quant à lui, reste en fuite.
Des volumes en berne et l’émergence de protocoles concurrents (Sinbad, THORSwap)
Mais Tornado Cash n’est pas mort.
Curieusement, GitHub a de nouveau référencé le code de son smart contract. Il est toujours possible d’accéder à son interface, en utilisant tout simplement un VPN. C’est aussi cela, la beauté de la blockchain : on ne peut tout simplement pas arrêter un outil décentralisé. Le code peut fonctionner à perpétuité sans maintenance de la part des développeurs …
Avant que le marteau des sanctions ne s’abatte, Tornado Cash jouissait d’un volume d’échanges robuste. De février à juillet 2022, le volume total s’élevait à plus de 2,8 milliards de dollars, selon l’étude de TRM Labs.
Cependant, lorsqu’on compare cette période faste à celle d’un an plus tard (de février à juillet 2023), le tableau est moins reluisant : le volume a plongé à 425 millions de dollars, ce qui traduit une contraction d’environ 85%.
Aux Etats-Unis, les “mixeurs de cryptos”, malgré leur caractère énigmatique, ne sont pas intrinsèquement illégaux. Néanmoins, ils doivent agir en conformité avec les balises réglementaires établies par le Financial Crime Enforcement Network (FinCEN), qui scrute les transactions financières pour sanctionner les opérations de blanchiment d’argent (il classe les mélangeurs parmi des transmetteurs d’argent en vertu de la loi du secret bancaire ou BSA).
Sources : TRM Labs
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