Trump est revenu à la Maison-Blanche en janvier 2025 avec une obsession affichée pour les cryptos. En trois mois, il a empilé les décisions marquantes, parfois contradictoires, qui redessinent déjà le paysage du numérique aux US. Reste à comprendre si ces choix bousculent vraiment les fondamentaux du marché ou s’ils brouillent encore un peu plus les lignes.
Quelles sont les promesses tenues ?
Dès la première semaine de mandat (20-26 janvier 2025), Trump lance une série d’initiatives structurantes pour le secteur.
Le 23 janvier, il signe un décret interdisant toute MNBC (CBDC) émise par la Réserve fédérale et crée un groupe de travail présidentiel dédié aux actifs numériques, dirigé par David Sacks qui est accessoirement nommé AI & Crypto Czar.
Cette cellule est chargée de proposer un cadre fédéral clair, avec un focus sur la compétitivité et la souveraineté technologique.
Le 7 mars, un autre décret établit une réserve stratégique de Bitcoins, regroupant les BTC saisis lors de poursuites pénales.
Il prévoit aussi l’achat de nouveaux actifs, mais sous la contrainte de neutralité budgétaire. Cela veut dire essentiellement que l’achat de BTC ne doit pas devenir une charge pour le gouvernement.
En matière de régulation, le 10 avril, il enterre une règle héritée de l’ère Biden qui imposait aux plateformes DeFi de suivre les mêmes obligations fiscales que les brokers. Le ton change aussi dans les agences.
Brian Quintenz prend la tête de la CFTC dès le 21 janvier, tandis que Paul Atkins, soutien affiché des cryptos, est confirmé à la SEC le 9 avril.
Résistance et incertitudes : Des signaux encore ambigus pour l’industrie
S’il est vrai que ces 100 jours ont été marqués par beaucoup d’annonces, sur le terrain, tout n’est pas si net. La fameuse réserve de Bitcoins annoncée le 7 mars ne repose sur aucun programme d’achat actif ; elle regroupe uniquement les avoirs déjà confisqués, sans vraie stratégie de gestion derrière.
Le même jour, Trump réunit plusieurs figures du secteur pour un sommet à la Maison-Blanche. L’événement marque un tournant symbolique, mais aucun plan concret n’en sort.
De même, le marché reste suspendu à deux textes majeurs encore en discussion au Congrès : le STABLE Act, censé encadrer les stablecoins, et le GENIUS Act, qui vise à clarifier la répartition des rôles entre SEC et CFTC en matière de cryptos. Ces projets sont toujours en commission au 30 avril.
Controverses et conflits d’intérêt
Comme à son habitude, la gestion de Trump ne s’est pas faite sans controverses. En effet, le président américain ne se contente pas de soutenir l’industrie, il y participe activement et cela dérange.
Trois jours avant son investiture, WLFI, la holding crypto de sa famille, lance un memecoin à son nom. L’actif flambe à 14 milliards de capitalisation avant de se tasser sous les 3 milliards quelques semaines plus tard.
Puis le 25 mars, même boîte, autre produit : une stablecoin, USD1, censée être adossée à des bons du Trésor, mais sans audit public ni transparence sur les réserves. La confusion entre pouvoir exécutif et intérêts privés sabote la légitimité politique que l’industrie cherche à construire depuis des années.
Volatilité accrue entre guerre commerciale et macro-incertaine
Les mesures pro-crypto n’ont pas suffi à compenser l’impact des décisions économiques plus larges. Le 1er février, Trump impose des droits de douane massifs sur la Chine, le Mexique et le Canada. Le Bitcoin perd 12 % en trois jours et les altcoins suivent.
Le 2 avril, nouvelle salve : tous les partenaires commerciaux qui taxent les produits américains écopent de 10 % de rétorsion. En conséquence, on se retrouve avec une chute généralisée du marché, dont une baisse de 17 % de la capitalisation crypto en une semaine.
Le contexte macro prend le dessus, et la politique commerciale brouille complètement les gains symboliques de la politique crypto.
Source : CoinMarketCap
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Emmanuel Mounier
Expert en crypto-monnaie
